samedi, avril 28, 2007

L'Imam Falardeau
sera pas content...


Ce soir, j'ai eu le plaisir de recevoir à souper mon ami et collègue blogueur hérétique Yves, de Commentaires iconoclastes, qui nous vient de loin dans l'Est du Québec et qui était de passage à Montréal. C'était notre toute première rencontre, et nous nous sommes bien bidonnés à nous raconter les anecdotes désopilantes de nos aventures respectives avec nos séparateux enragés favoris.

Vous auriez dû entendre Yves me raconter ses bien téméraires incursions dans le forum du journal intégriste Le Québécois, c'était à s'en tordre de rire !

Pour faire une histoire courte : notre ami Yves se trouvait alors à personnifier l'agneau qui se retrouve en plein milieu d'une meute de loups enragés. Et figurez-vous aussi qu'aussitôt après avoir été déchiqueté à grandes et féroces mordées par les loups, ce qui restait de la carcasse de notre "agneau" s'est vite vu imposer le bannissement perpétuel de ce forum très "ouvert" et "tolérant", et cela par nul autre que le Dr. Patrick Bourgeoys, le Suprême Gardien de la Porte du Temple.

Parlant d'agneau, justement, j'avais décidé de préparer pour le souper une recette que j'affectionne particulièrement, et qui se nomme Agneau aux oignons blancs (voir image ci-dessus, tirée de Saveurs d'Algérie, de Fadéla Benabadji, éditions EDL). C'est que, compte tenu des propos complètement débiles et remplis de xénophobie maladive qu'a déjà tenus à l'encontre du cosmopolitisme culinaire le Guide Spirituel de l'aile intégriste du mouvement nationaliste et indépendantiste québécois, qui, bien sûr, n'est nul autre que Sa Splendeur l'Imam Pierre Falardeau, je me suis persuadé que je ne pouvais pas manquer de souligner la visite de Yves en préparant à son intention un plat de cette cuisine étrangère qui répugne si horriblement aux papilles gustatives de notre Imam national.

Donc, au lieu de ce « ragoût de pattes de nos mères » farouchement défendu par l'Imam Falardeau qui dénonce impitoyablement les méprisables «suceux de sushis» qui, selon lui, «crachent» dessus, j'ai donc décidé à mon tour de souscrire effrontément à ce qui, selon la Parole Sacrée de l'Imam, n'est que cette répugnante «idéologie à la mode, qui sert de pensée à tous les consommateurs d’exotisme culturel de surface».

Oui mes amis, vous avez bien lu (les citations de l'Imam sont exactes et elles ne sont en rien tirées de leur contexte) : selon la Science si Sublime de ce Grand Esprit qu'est l'Imam Falardeau, aimer la cuisine étrangère et manger de temps en temps autre chose que de la tourtière ou du ragout de pattes de cochon ne relèverait ni plus ni moins que d'une idéologie pernicieuse qui ne contribuerait qu'à souiller la Pureté de notre Grande Nation.

Vous aimez donc bouffer parfois de la cuisine vietnamienne, thaï, mexicaine, maghrébine, etc. Mais sachez donc, bande d'inconscients, que, ce faisant, ce n'est pas simplement votre appétit que vous vous trouvez à assouvir. Non, mes amis, réveillez-vous !!! Rendez-vous enfin compte que vous vous faites ainsi les ignobles complices d'une idéologie perverse qui détruit notre Âme Nationale tout en vous éloignant de ce Culte des Ancêtres dont la seule évocation fait se ramollir les jambes de notre Imam national. Comprenez aussi, gang de félons, qu'en vous adonnant à cette cuisine étrangère, vous commettez un abject crime de trahison nationale...

Devant un pareil sommet de bêtise, il faut dire que si le ridicule tuait, ça ferait longtemps qu'on aurait assisté aux funérailles de l'Imam Falardeau, car il est vrai que plus con que ça, tu meurs. Mais ces propos complètement débiles et xénophobes, l'Imam Falardeau les a bel et bien dits, pourtant, et publiquement par-dessus le marché. Après ça, on trouve encore des gens au Québec qui se croient sains d'esprit mais qui admirent quand même un personnage aussi réactionnaire et capable d'un crétinisme de si haute voltige, ou qui le trouvent encore "respectable". Trouvez l'erreur... parce que moi, ça fait déjà longtemps que j'ai lancé la serviette devant l'épaisseur d'un tel mystère...

J'ai donc, sans gêne aucune, rejoint moi aussi les rangs de ceux qui, toujours selon la Sainte Parole de l'Imam Falardeau, «se prennent pour le bout d’la marde, la crème de l’humanité, parce qu’ils mangent des sushis, des souvlakis ou de la panse de brebis farcie».

En fait, j'en suis d'autant plus fier après qu'une visiteuse de ce blogue m'ait rappelé, dans un commentaire laissé la semaine dernière, qu'il y a quelques années, l'Imam Falardeau s'en était pris au chroniqueur d'origine maghrébine Bernard Boulad, qui avait osé -- Ô l'infâme insolent! -- critiquer l'une de ses "oeuvres" si "géniales", du moins aux yeux de l'Imam lui-même. Et l'argument-massue de l'Imam Falardeau donnait en substance ceci : «C'est quoi, calisse, ton ostie d' problème, Boulad ? T'as pas digéré tes merguez ?».

C'est qu'il est vrai que l'Imam Falardeau a l'épiderme très sensible devant la moindre critique à l'égard de ce qu'il croit dur comme fer être son propre "génie". Mais quand la critique vient par surcroît d'un "étranger-qui-est-même-pas-né-icitte", l'Imam en perd vite les pédales et sa véritable nature se révèle alors dans ses plus beaux atours : se mettent alors à éructer de ses Lèvres Augustes de nauséabonds torrents d'insultes à caractère soit haineux, ou soit raciste comme lorsqu'il visait Bernard Boulad...

Toutefois, pour ce qui me concerne, ça me donne surtout le goût d'aimer les merguez encore plus qu'avant...

Donc, notre ami Yves et moi nous sommes régalés ce soir de ce savoureux mets algérien qu'est l'Agneau aux oignons blancs. Faut que j'avoue que j'en avais déjà fait à ma blonde, il y a quelques semaines, et son enthousiasme n'a pu que m'encourager à récidiver. Cette fois-ci, c'est donc Yves qui en a profité, le tout arrosé d'un excellent vin que ce connaisseur trop humble a judicieusement choisi.

Pour le cas où vous, cher lecteur ou lectrice, voudriez à votre tour vous adonner à cet affreux cosmopolitisme culinaire, donc joindre vous aussi les rangs de ces infidèles qui, en toute insolence, «se prennent pour le bout d’la marde, la crème de l’humanité» parce que vous osez, perfide graine de traître que vous êtes, manger parfois autre chose que la cuisine bien grasse de nos Glorieux Ancêtres, j'ai songé à vous partager la recette de ce plat algérien exquis qu'est l'Agneau aux oignons blancs. (Au fait, histoire de faire suer encore plus l'Imam Falardeau et ses adeptes dans leur dégoût pour tout ce qui est étranger, ça se dit ainsi en langue berbère : «Ilham bel bsal oua tomatech»). Et vous verrez, ça se prépare très facilement, un vrai charme, en fait...

Vous m'en donnerez des nouvelles... Bon appétit !

P.S. : Malgré les prétentions de l'Imam Falardeau, ne vous inquiétez pas trop : vous parlerez encore français après en avoir mangé, et votre identité québécoise n'en sera amoindrie d'aucune façon...


AGNEAU AUX OIGNONS BLANCS

Temps de préparation : 25 min.
Temps de cuisson : 1 h 20

Ingrédients :

500 g de côtelettes de longe d'agneau
500 g d'oignons
3 tomates
1/2 boîte de pois chiches
1/2 cuillerée à café de poivre noir
1 cuillerée à café de cannelle
1 cuillerée à café de paprika
2 cuillerées à soupe d'huile d'olive
sel/poivre

Déposer les côtelettes d'agneau dans une marmite avec la cannelle, le poivre noir et l'huile. Faites revenir puis couvrir d'eau en ajoutant le paprika et les pois chiches. Chauffer à feu moyen-doux.

Hacher grossièrement l'oignon. Couper les tomates en cubes de 3 cm. À mi-cuisson de la viande (donc après 40 minutes), ajouter l'oignon et les tomates dans la marmite et poursuivre la cuisson. Laisser mijoter pour réduire un peu la sauce.

Déposer sur un lit de couscous dans l'assiette. Déguster.

Astuce : les haricots verts frais conviennent également à cette recette à la place des oignons.