mercredi, avril 09, 2008

La théocratie
tibétaine
et ses
charmes...

Dans son Hokus Bloggus, mon ami Xavier a reproduit un article récent du parlementaire socialiste français Jean-Luc Mélanchon, qui s'oppose au boycott des Jeux Olympiques de Beijing.

J'en reproduis ici-bas un extrait, qui a de quoi faire réfléchir nos bien-pensants et ceux qui s'empressent un peu trop vite de voir des luttes de "libération nationale" partout. Après tout, l'histoire n'a-t-elle pas prouvé que, souvent, ce sont les éléments les plus réactionnaires d'une société qui ont constamment les mots "libération nationale" à la bouche ? Qu'on étudie d'un peu plus près nos "libérateurs nationaux" des années 1930 et 1940 à nous, de même que ceux qui s'en réclament toujours, et on s'en rendra bien compte...


LE RÉGIME THÉOCRATIQUE EST INDÉFENDABLE

par Jean-Luc Mélanchon

" Le Tibet est chinois depuis le quatorzième siècle. Lhassa était sous autorité chinoise puis mandchoue avant que Besançon ou Dôle soient sous l'autorité des rois de France. Parler «d'invasion » en 1959 pour qualifier un événement à l'intérieur de la révolution chinoise est aberrant. Dit-on que la France a « envahi » la Vendée quand les armées de notre République y sont entrées contre les insurgés royalistes du cru ?

Le Dalaï Lama et les autres seigneurs tibétains ont accepté tout ce que la Chine communiste leur proposait et offrait, comme par exemple le poste de vice président de l'assemblée populaire que « sa sainteté » a occupé sans rechigner. Cela jusqu'au jour de 1956 où le régime communiste a décidé d'abolir le servage au Tibet et régions limitrophes.

Dans une négation des traditions, que j'approuve entièrement, les communistes ont abrogé les codes qui classaient la population en trois catégories et neuf classes dont le prix de la vie était précisé, codes qui donnaient aux propriétaires de serfs et d'esclaves le droit de vie, de mort et de tortures sur eux. On n'évoque pas le statut des femmes sous ce régime là. Mais il est possible de se renseigner si l'on a le coeur bien accroché.

L'autorité communiste a mis fin aux luttes violentes entre chefs locaux du prétendu paradis de la non-violence, ainsi qu'aux divers châtiments sanglants que les moines infligeaient à ceux qui contrevenaient aux règles religieuses dont ils étaient les gardiens. La version tibétaine de la Charria a pris fin avec les communistes. La révolte de 1959 fut préparée, armée, entretenue et financée par les USA dans le cadre de la guerre froide.

Voilà ce qu'il en est des traditions charmantes du régime du Dalaï Lama avant les communistes et de l'horrible « invasion » qui y a mis fin. Depuis, la scolarisation des enfants du Tibet concerne 81% d'entre eux là où il n'y en avait que 2% au temps béni des traditions. Et l'espérance de vie dans l'enfer chinois contemporain prolonge la vie des esclaves de cette vallée de larmes de 35,5 à 67 ans. En foi de quoi l'anéantissement des tibétain se manifeste par le doublement de la population tibétaine depuis 1959, faisant passer celle-ci de un million à deux millions et demi.

Pour tout cela, la situation mérite mieux, davantage de circonspection, plus de respect pour les chinois que les clichés ridicules que colportent des gens qui ne voudraient ni pour eux, ni pour leur compagne ni pour leurs enfants d'un régime aussi lamentable que celui du roi des moines bouddhistes du Tibet. (souligné par moi : DL)

À l'heure actuelle, je n'éprouve aucune sympathie pour « le gouvernement en exil du Tibet » dont sa sainteté est le décideur ultime sur pratiquement toutes les questions, où siège un nombre de membres de sa famille qu'il est tout à fait inhabituel de trouver dans un gouvernement, même en exil, sans parler de leur présence aux postes clefs de la finance et des affaires de cet exil.

Je respecte le droit de sa sainteté de croire ce qu'elle veut et à ses partisans de même. Mais je m'accorde le droit d'être en désaccord total avec l'idée de leur régime théocratique. Je suis également hostile à l'embrigadement d'enfants dans les monastères. Je suis opposé à l'existence du servage. Je suis laïque partout et pour tous, et donc totalement opposé à l'autorité politique des religieux, même de ceux que l'album "Tintin au Tibet" a rendu attendrissants et qui ne l'ont pourtant jamais été.

Je désapprouve aussi les prises de position du "roi des moines" contre l'avortement et les homosexuels. Même non violentes et entourées de sourires assez séducteurs, ses déclarations sur ces deux sujets sont à mes yeux aussi archaïques que son projet politique et théocratique. Je n'ai jamais soutenu l'Ayatollah Khomeiny, même quand j'étais contre le Shah d'Iran. Je ne soutiens pas davantage ni n'encourage le Dalaï Lama, ni dans sa religion qui ne me concerne pas, ni dans ses prétentions politiques que je désapprouve, ni dans ses tentatives sécessionistes que je condamne.

Je demande: pourquoi, pour exercer sa religion et la diriger, le Dalaï Lama aurait-il besoin d'un État ? Un État qui, pour être constitué, demanderait d'amputer la Chine du quart de sa surface! Son magistère moral et religieux actuel souffre-t-il de n'être assis sur aucune royauté ? "